Durant de longs mois, Didier Bès, l’entraineur de la mêlée clermontoise, a suivi la remise en condition de ses joueurs sans vraiment pouvoir prodiguer ses conseils, contraint par les dispositions sanitaires mises en place d’attendre le bon moment pour reprendre. Depuis une quinzaine de jours, l’ancien talonneur, a retrouvé ses joueurs et son joug, la mêlée est de retour, le Rugby peut repartir.  

 

Quoi de plus identitaire que la mêlée pour définir notre sport ? Ce moment d’affrontement solennel qui a su traverser les temps, a été le dernier à faire son retour dans la crise sanitaire et on le comprend… A huit contre huit, dans un exercice éprouvant où la cohésion se mêle à un effort intense, tout est réuni pour augmenter les risques de contamination. Les joueurs ont ainsi dû attendre… Didier aussi. Alors au moment de reprendre, passée l’impatience, on s’est demandé, si comme la bicyclette, les mêlées ne s’oubliaient pas après plus de 6 mois sans pratiquer ? Avec l’accent chantant de son Tarn natal et le sens de la formule, le responsable de la mêlée clermontoise répond sans détours. « Les bonnes habitudes ont tendance à se perdre pendant que les mauvais reflexes reviennent… » Ainsi le technicien avoue avoir vu des « postures pas bien jolies » au moment de la reprise des exercices pratiques. « En fait, le cerveau enregistre des mouvements de repli lorsque le corps se retrouve dans une situation de contrainte. C’est une forme de reflexe pour retrouver une position de confort. Le problème est que cette position est antagoniste de celle de puissance et de force. » Celle que Didier compte bien retrouver dans les prochaines semaines afin d’assurer aux Auvergnats des lancements propres. « Nous avons repris le travail par des exercices basiques, à trois contre trois, notamment. Je ne suis pas inquiet car cela revient vite. Les garçons retrouvent les bonnes postures grâce à la collaboration qui a été mise en place avec les préparateurs physiques et quelques suppléments de gainage. » Les progrès sont déjà notables après quelques semaines de pratique, reste désormais à développer les automatismes et la cohésion dans un groupe où de nombreux joueurs intègre l’édifice auvergnat. « La mêlée est un exercice particulier où chacun joue un rôle pour le collectif et où il faut trouver sa place. Nous avons eu beaucoup de rotations à des postes importants comme celui de talonneur. Notre objectif, dans les prochaines semaines, est de trouver les bonnes connexions, le bon liant, afin de solidariser l’édifice. Face à Aurillac (vendredi dernier, lors de l’entraînement dirigé), nous avons clairement manqué de synchronisation au niveau de l’impact et la mêlée s’est parfois retrouvée en difficulté. » 

 

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Une sensation que n’apprécie pas vraiment le responsable du secteur chez les « jaune et bleu ». « Le problème est que la mêlée, même si certains travaillent toujours à en réduire l’influence, reste une phase extrêmement importante aussi bien tactiquement que psychologiquement. C’est d’ailleurs la seule phase de lancement qui permet d’aboutir à une situation où les trois-quarts s’affrontent entre-eux. » Didier prend exemple sur l’hémisphère sud pour argumenter ses propos. « En Nouvelle-Zélande, là où les tendances du rugby naissent et se construisent, il n’y a qu’à voir le championnat national pour comprendre l’importance de la mêlée. On se focalise sur le jeu de mouvement, mais l’équipe qui domine le championnat, cette saison encore, (les Crusaders) sont les plus performants en mêlée. Cette saison, ils ont marché sur tout le monde dans ce domaine et pris un ascendant énorme sur leurs adversaires, il n’y a pas de secret… » Le célèbre « No Scrum, No Win » si cher aux Britanniques a aussi du sens de l’autre côté de la planète et dans l’esprit de Didier. « Même si nous avons pris le parti d’avoir des joueurs dynamiques avec une grosse vitesse d’exécution lors des saisons à venir, nous ne voulons pas que cela impacte négativement sur la mêlée qui reste prioritaire. Il va falloir chercher plus de cohésion, avoir de solides garanties sur notre technique individuelle et collective et se servir de nos forces pour rapidement être performants afin de faire de notre mêlée la base de lancement sûre et fiable qu’elle doit être pour notre jeu. »

 

Les matches de préparation seront décortiqués à la loupe par Didier qui sait que les oppositions offertes par Bordeaux et le LOU seront deux belles occasions de se jauger avant de retrouver le Championnat où la mêlée fait encore partie de l’ADN de cette compétition et semble avoir de beaux jours devant elle.