Certaines carrières sont linéaires, d’autres plus tortueuses. Marvin a appris à se servir des aspérités de la sienne et de ses nombreuses expériences vécues pour se forger un caractère et une carapace qui le protègent aujourd’hui de toute forme de lassitude. Ainsi, c’est avec l’envie d’un junior que cet ailier explosif savoure chaque seconde passée sur un terrain de rugby. Désormais engagé sous nos couleurs jusqu’en juin 2024, on peut compter sur lui pour les défendre avec tout son cœur. 

 

L’histoire a commencé à la frontière franco-suisse, au RC Annemasse, où Marvin a débuté le rugby avant de rejoindre le FC Grenoble en cadet. Intégré au Pôle France et propulsé très jeune en Pro D2, il s’impose comme un grand espoir du rugby tricolore. De nombreux clubs lui font de l’œil mais c’est à Bayonne qu’il décide, une première fois, de poser ses valises. « Avec l’Aviron, je découvrais le haut niveau, le Top 14, la ferveur d’un club porté par son environnement. D’un point de vue personnel, tout s’est très bien passé, mais… » Le premier « mais », c’est le début des rebondissements pour une carrière qui va prendre un chemin plus chaotique que les premières années avaient pu laisser espérer… « J’étais venu à Bayonne pour le Top 14, après quelques saisons à batailler pour le maintien, nous sommes redescendus en ProD2. L’opportunité de Montpellier s’est alors présentée ». Marvin la saisit et démarre son aventure en boulet de canon jusqu’à ce qu’une vilaine blessure vienne tout foutre en l’air… « à partir de là, ce fut la descente aux enfers ! » 11 mois de douleurs, de doutes et un épilogue qui fera couler beaucoup d’encre avec le tristement célèbre épisode du barbecue montpelliérain. Au terme de celui-ci, 6 joueurs sont remerciés et quittent le club avec effet immédiat. Marvin fait partie de la liste noire et doit aller se relancer… ailleurs. Paris l’accueille mais son genou fait de la résistance et les sensations tardent à revenir. Le doute s’installe. Alors que le club vivote dans la deuxième moitié du classement, une première salve limoge une partie du staff technique avant que les joueurs soient invités à faire la même chose en fin de saison. L’histoire se renouvèle pour Marvin, pris dans un nouveau wagon de 12 joueurs stoppés net fin 2018. (Le Stade Français ayant profité d’une dernière fenêtre de tir avant que les indemnités ne rentrent dans le salary cap et que le règlement encadre ses pratiques… pour le moins brutales). Le coup est très dur à encaisser. 

 

« Mes deux dernières expériences à XV avaient, à la fois, laissé un gout d’inachevé et des doutes sur ma capacité à revenir dans le Top 14. J’attendais probablement, quelque part, l’occasion d’y revenir pour me prouver quelque chose. »

 

La carrière, une nouvelle fois mise entre parenthèses, laisse place « aux heures sombres. » « J’étais au fond du trou ! Avec le recul, je sais que cela m’a permis de relativiser sur ce que je vis aujourd’hui et la chance que j’ai de profiter de ma passion, mais sur le moment, j’ai pris une grosse claque. » Le Seven va lui tendre la main en lui offrant un nouveau départ. « Cela m’a fait le plus grand bien. J’ai perdu du volume pour gagner en explosivité et en vitesse. Ces changements ont permis à mon genou de retrouver toutes ses sensations. Je me sentais bien, super bien même ! Nous avons vécu 3 saisons magnifiques en développant cette discipline et en allant chercher 3 finales sur le circuit mondial ». Comme il l’a toujours fait, Marvin vit le moment pleinement parcourant le monde (Hong-Kong, Las Vegas, Dubaï, le Cap, Vancouver…) au fil des étapes du World Séries « mais », une fois encore, le chemin va prendre des contours sinueux… L’épidémie fait son apparition et chamboule complètement le circuit mondial : les compétitions sont à l’arrêt, les joueurs contraints de s’occuper en attendant. « Mes deux dernières expériences à XV avaient, à la fois, laissé un gout d’inachevé et des doutes sur ma capacité à revenir dans le Top 14. J’attendais probablement, quelque part, l’occasion d’y revenir pour me prouver quelque chose. » Clermont lui a offert cette opportunité. Le tempérament, l’état d’esprit et le talent de Marvin ont fait le reste poursuivant les quelques mois de « joker médical » en un engagement sur la durée (juin 2024). « Depuis mon arrivée à Clermont, je suis le plus heureux du monde »sourit celui dont le parcours n’a rien à voir avec un long fleuve tranquille. « Je sais que je n’ai pas eu une carrière linéaire. J’ai subi quelques décisions mais j’assume tout !  Cela m’a permis de me construire en alternant entre les grandes joies, les espoirs et les moments très durs, très compliqués. Être passé par là me permet aujourd’hui de relativiser pas mal de choses. J’ai 30 ans, et je suis convaincu que le plus important est aujourd’hui de se régaler en profitant de la chance que nous avons. A chaque fois qu’on me donnera l’occasion de défendre ce maillot, je ne calculerai rien, je donnerai le maximum. » Des paroles qui claquent, chargés d’émotion … et de faits car Marvin n’est pas du genre à trainer les pieds lorsque la porte du vestiaire s’ouvre sur le terrain d’entrainement. Le sourire bien accroché au visage, il croque dans chaque minute. « Les carrières passent trop vite. Je préfère construire des souvenirs plutôt que ruminer des regrets. J’ai appris à dédramatiser, cela m’a permis de retrouver le goût au plaisir. Quand tu sors du tunnel et que tu vois à nouveau la lumière, tu savoures chaque instant. » L’allégorie renvoie inévitablement plus loin qu’un terrain de rugby, plus loin qu’un joueur ou qu’une carrière dont les fluctuations suivent naturellement les performances ou les blessures. Marvin, qui a pas mal bourlingué avant de pouvoir enfin se projeter, joue avec ses sentiments, son cœur : son véritable moteur. Alors même s’il sait qu’en posant ses valises en Auvergne « les attentes sont énormes », il savoure « l’atmosphère extraordinaire de ce stade et la ferveur qui entoure le club » conscient que porter ce maillot « jaune et bleu » est « quelque chose qui se respecte et se mérite ». Nul doute qu’il donnera tout ce qu’il a dans les jambes et le cœur pour le porter avec honneur à chaque fois qu’il en aura l’opportunité. Le sport n’est finalement qu’un vecteur d’émotions, celles de Marvin sont entières, à fleur de peau, prêtes à être partagées et prendre forme sur un terrain de rugby. 

 

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