Le talent de ce joueur d’exception n’avait échappé à personne après son explosion médiatique lors de la dernière Coupe du Monde dans son pays, il restait à savoir comment Kotaro serait capable de s’adapter à un championnat musclé et un environnement aux antipodes de celui dans lequel il évoluait au pays du soleil levant. Quelques mois après son arrivée aux pieds des volcans, son adaptation est une belle réussite et ses performances sont au rendez-vous puisqu’il s’est imposé en quelques mois comme un élément incontournable de la ligne d’attaque montferrandaise, la plus prolifique du championnat… Rencontre avec celui qui n’attend que le retour du public pour devenir l’un des chouchous du Michelin !

 

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« Mat’s » comme le surnomment la plupart de ses coéquipiers n’est pas le joueur clermontois le plus extraverti et ne rivalise pas encore avec Peceli Yato, Sébastien Bézy ou Yohan Beheregaray quand il s’agit de manigancer une « blague » dans les couloirs du CEP pour faire marrer l’auditoire, pourtant l’arrière japonais est désormais bien loin de l’image que l’on peut se faire de ce joueur aux mille talents et au peu de mots… Un sourire affiché à longueur de journée, quelques tirages de maillots en début d’entrainement ou une franche rigolade avec un de ses « buddies » (potes en anglais dans le texte) témoignent de la parfaite intégration de l’arrière « jaune et bleu » qui n’aura mis que quelques semaines à s’imposer dans le fond de terrain clermontois. Baladé entre l’aile et l’arrière sur les premières semaines de compétition, Kotaro a toujours revendiqué sa préférence à l’arrière et n’a pas manqué l’occasion de s’y imposer dès le mois de novembre. Depuis, hormis deux petits soucis musculaires, la place lui semble réservée et les statistiques plaident en sa faveur puisqu’avec 17 titularisations (3ème joueur de l’ASM le plus utilisé derrière Camille Lopez et Fritz Lee) 29 franchissements et 9 essais, Kotaro est à la fois l’un des Clermontois les plus sollicités et le plus tranchant de ce début de saison. De quoi réjouir l’arrière japonais qui reconnait « vivre, jusqu’à présent, une expérience géniale depuis son arrivée à Clermont » avant d’aussitôt en espérer encore davantage… « Je pense que je peux faire encore mieux et donner encore davantage pour l’équipe », poursuit-il. « Le championnat de France et la Coupe d’Europe sont des compétitions qui sont très différentes de ce que j’ai pu connaitre ailleurs dans ma carrière. Il y a une dimension physique très importante qu’il a fallu appréhender dans ma manière de jouer. C’est un grand défi de se confronter à des choses différentes mais je pense que je suis en train de m’habituer à cette dimension, la densité et la sévérité des contacts. Je me sens de plus en plus à l’aise. » Ainsi le prodige japonais a dû se réapproprier son jeu mais aussi son corps pour le préparer à un championnat qui n’épargne pas les physiques trop fragiles. Pris en main par les préparateurs physiques clermontois lors de son arrivée en juin dernier, « Mat’s » a ainsi renforcé l’armure pour se préparer aux joutes musclées du championnat français. « J’ai pris entre 6 et 7kg depuis mon arrivée car j’avais besoin de me préparer au Top 14, mais après quelques mois de compétition, je me sens un peu lourd et je me rends compte qu’il serait préférable de redescendre de 2kg. Je travaille pour cela… »

 

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Pas question pour ce joueur aux accélérations de dragster et aux crochets de feu de faire des concessions sur l’explosivité et la vitesse qui en font un joueur d’exception capable de franchir et casser de nombreux plaquages sur la scène française ou internationale. « Je suis encore dans une phase ou j’essaye de trouver le bon équilibre entre mon ressenti et mon physique pour aborder au mieux ce championnat. Je pense être sur la bonne voie, j’espère que cela va payer et que je serais encore plus efficace dans les semaines et mois à venir ». Cela promet, les défenses adverses peuvent commencer à trembler d’autant que l’association Damian Penaud, Alivereti Raka a déjà fait des merveilles à chaque fois qu’elle a eu l’occasion de s’exprimer aux côtés de Kotaro. « Damian et Raka ont une puissance et une vitesse complétement irréelles. Ils peuvent briser n’importe quelle défense de nombreuses fois à tous les matches, mon boulot est de créer des espaces pour eux, pour les mettre dans les meilleures conditions pour marquer et faire basculer les rencontres. » La preuve que cette association « galactique » fonctionne à merveille… les deux ailiers disent la même chose de Mat’s « Pour marquer, il suffit de sortir à hauteur et d’attendre qu’il nous donne le ballon ! » Cela parait si simple… Et même si l’arrière clermontois est le meilleur marqueur de son équipe (déjà 9 essais cette saison) c’est plutôt dans la création qu’il reconnait s’épanouir « J’aime créer des espaces, saisir des opportunités et provoquer des déséquilibres chez les adversaires. Le jeu et les systèmes clermontois me permettent cette liberté et cela ressemble beaucoup finalement avec ce que je pouvais faire au Japon ou dans ma sélection. »

 

« J’ai hâte d’avoir la chance de jouer devant tous nos supporters ! »

 

 Loin d’être contraint par un jeu plus restrictif, il faut pourtant reconnaitre que le Top 14 peut paraitre plus stratégique lors de certaines rencontres où l’occupation devient prépondérante comme ce fut récemment le cas face à Montpellier où pas moins d’une soixantaine de ballons (57 précisément !) se sont échangés de part et d’autre… Il en faut plus pour démobiliser Kotaro. « C’est certain que le championnat de France peut parfois être plus fermé que les compétitions auxquelles j’ai été habitué à participer, et franchement je n’ai pas souvenir d’avoir reçu autant de ballons dans toutes ma carrière que lors de ce match face au MHR », rigole l’arrière japonais. « Mais cela fait partie du métier, c’est mon boulot de réceptionner ces ballons et de me retrouver sous pression » Un rôle que l’international japonais assume aussi bien que lorsqu’il récite avec brio sa partition offensive, car, là aussi, le joueur ne laisse rien au hasard travaillant avec précision et régularité chaque secteur de son jeu. Le monde du rugby le connaissait rapide, perforant, tranchant, les Auvergnats le découvrent aussi rigoureux, précis dans ses placements et doté d’un jeu au pied puissant. Probablement de quoi en faire rapidement l’un des joueurs préférés de la Yellow Army lorsque celle-ci sera autorisée à revenir régner dans son jardin du Michelin désespérément vide. En attendant, les supporters auvergnats transposent leur ferveur sur les réseaux sociaux rejoignant ainsi la puissante communauté de fans japonais très active… mais rien ne remplace la vraie vie et si Kotaro est ravi de voir grandir le nombre de ses « followers », il attend avec impatience les vrais échanges avec un stade qu’il sait mythique. « Depuis que je suis en Auvergne, les contraintes du Covid pèsent sur le club et je n’ai pas encore connu l’ambiance de ce stade dont j’ai vu des images incroyables. J’espère que très vite, je pourrais la découvrir et jouer devant la Yellow Army dans un Michelin plein ! » En attendant que l’épidémie lève progressivement son emprise sur le monde, c’est vers la fin de saison que Kotaro commence à regarder avec ambition. « A 7 journées de la fin des phases régulières, le Top 14 est encore très serré, l’aspect mental fera à mon avis la différence entre les équipes. J’ai confiance en notre potentiel et aux qualités de notre groupe, il faut simplement croire en nous-mêmes, nous pouvons aller chercher de belles choses. » C’est avec beaucoup de maturité et de sérénité que l’arrière japonais aborde sa première saison sous ses nouvelles couleurs, une force tranquille et inspirante qui n’est pas sans rappeler, le mont Fuji, l’un des lieux symboliques de son pays et cousin éloigné du Puy de Dôme aux mêmes origines volcaniques. 

 

De son Japon d’où il s’est habitué « à être éloigné » après des expériences rugbystique en Afrique du Sud et en Australie au bénéfice d’une carrière multiculturelle enrichissante, il regrette simplement « sa famille, ses amis et la nourriture qui lui manquent… » Pour la famille et les amis, on espère que les contraintes liées au Covid s’allègeront rapidement afin de permettre à Kotaro de retrouver les siens quant à la nourriture nous sommes certains que les Auvergnats seront prêts à se mettre en quatre pour lui donner les bons plans afin de s’approvisionner en Ramen, Soba, Yaki et Yakitori, ces petites merveilles de la cuisine traditionnelle japonaise, qu’il dévore avec autant d’appétit que les intervalles sur un terrain de rugby…

 

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