L’ASM Clermont Auvergne en pause, comme de nombreuses autres entreprises en France et dans le monde, traverse une situation aussi inédite que compliquée. Eric de Cromières, le président des « jaune et bleu », tient la barre d’un navire à quai en étudiant les meilleures solutions de reprise au moment où le confinement sera levé et quand le feu vert sera donné pour la reprise de la compétition. Avec la volonté de n’oublier personne, le président travaille sur des mesures qui doivent encore être ajustées en fonction des évènements à venir mais aussi au niveau de la LNR où sa collaboration participe à la réflexion commune. Entretien…

 

Quelle est, aujourd’hui, la situation du club après une semaine de confinement ?
Le club est complètement à l’arrêt à quelques exceptions près. Nous essayons de garder un peu de communication, le service de comptabilité et aussi la fonction de directeur administratif du club qui travaille actuellement sur plusieurs sujets en cours et notamment l’aspect juridique des contrats pour la saison prochaine. Enfin, le stade reste ouvert pour l’installation des futurs projecteurs LED qui équiperont le stade dans les mois à venir. Tant que les travaux sont permis et possibles, notre stadium manager s’occupe du bon déroulement de ceux-ci. Du côté du sportif, les joueurs et le staff sont au chômage partiel pendant toute la durée du confinement. Ils ont un groupe d’échanges (Whatsapp) pour se donner des bonnes idées et s’encourager dans cette période inédite que chacun doit traverser. Les contacts sont permanents qu’ils soient à travers le groupe ou directs par téléphone de façon individuelle. J’y participe également afin d’entretenir des relations qui sont importantes dans une équipe et un club. Sébastien Vahaamahina a permis à beaucoup de joueurs de récupérer du matériel de musculation afin de s’entretenir de façon individuelle à distance et chez soi. Cela se passe aussi bien que possible, dans le contexte actuel.

 

Sans visibilité pour une éventuelle reprise, le club est-il en danger ?
Je ne pense pas qu’à ce jour, le club soit en danger. Il est certain qu’il peut se retrouver dans une situation difficile si nous n’avions plus la possibilité de jouer jusqu’à la fin de la saison… Il faudrait, à ce moment-là, recourir à un emprunt pour éponger les dettes que nous aurions et qui pourraient monter jusqu’à 4-5 millions d’Euros dans le pire des cas. Nous n’aurions pas d’autres choix que de l’étaler sur 4-5 saisons ce qui nous mettrait forcément dans une situation délicate. Ce n’est pas encore à l’ordre du jour puisque nous esperons reprendre. Et quand bien même cela devait arriver, cela se gère, d’autres entreprises seront obligées de passer par là. En sachant se battre et en faisant les sacrifices qui conviennent, nous arriverons à nous en sortir. Nous ne sommes donc pas en « danger ». Comme nous sommes des gestionnaires raisonnables, je pense que nous arriverons à nous en sortir plus ou moins bien.

 

Nos supporters et partenaires qui subissent également une pause dans leur saison en plus d’éprouver comme l’ensemble de la population et des entreprises des difficultés personnelles, entrent-ils dans votre réflexion quant à l’avenir ?

Bien sûr, il est encore trop tôt pour annoncer d’éventuelles mesures que nous aurons à prendre car nous ne savons pas encore quand et si nous allons reprendre et dans quelle santé financière nous nous retrouverons à la fin de cette saison. Cela dit, si nous le pouvons, nous veillerons sur l’année prochaine à tenir compte des préjudices qu’auront subi les uns et les autres lors de cette saison afin de rééquilibrer la situation du mieux que nous pourrons. Toutes les populations qui composent notre communauté ASM, supporters, abonnés, partenaires petits et grands seront considérés avec la même attention afin de garder le lien et de trouver des solutions pour chacun. 

 

« Nous devons traiter le problème au niveau de la Ligue et pas à la hauteur des opinions des responsables sportifs des clubs dont les solutions sont trop souvent en adéquation avec leurs propres objectifs. »

 

Au niveau de la LNR, les présidents de clubs, dont vous faites partie, ont commencé à travailler sur plusieurs hypothèses de reprise, et le moins que l’on puisse dire c’est que l’on semble loin de l’unanimité…
Effectivement, les présidents travaillent et cherchent des solutions. Ce qui n’est pas admissible, c’est de lire les avis de personnes qui ne sont pas présidents de club et se permettent de donner leur avis. Je pense notamment à Philippe Saint André ou Christophe Urios. Les présidents font attention à ne pas exprimer leur avis, ce ne sont pas à leurs adjoints de s’exprimer sur le sujet. Philippe Saint-André est dans son club depuis une quinzaine de jours, je ne vois pas ce qu’il a à dire et à quel titre il le fait. Il n’est pas question d’un combat de coqs ni d’intérêts égoïstes de chaque club mais d’une cause commune pour terminer cette saison de la meilleure des manières. Laissons travailler les présidents de clubs, entre-eux, ils sont assez raisonnables et conscients de ce qu’ils portent qui va bien au-delà d’une simple saison sportive. Les coachs peuvent, et c’est le cas ici en tout cas, donner leur avis en interne, mais je pense qu’ils devraient s’abstenir de le faire de manière publique. 

 

Dans cette situation exceptionnelle que traverse le rugby français, l’intérêt collectif doit primer sur les ambitions sportives de chacun…
Absolument et c’est pour cela que nous devons traiter le problème au niveau de la Ligue et pas à la hauteur des opinions des responsables sportifs des clubs dont les solutions sont trop souvent en adéquation avec leurs propres objectifs.

 

On entend parler d’une Coupe d’Europe qui pourrait redémarrer au mois de juillet…
On ne le sait pas encore. Nous essayons de privilégier une solution qui permettrait de rester dans les clous au niveau des dates de fin du championnat car certaines d’entre-elles engagent des locations de stades. Il faudra ensuite (et toujours en fonction de la fin du confinement et d’une reprise de compétition possible) caler la Coupe d’Europe avec éventuellement la tournée de l’équipe de France, qui semble elle aussi entre parenthèses, mais aussi des contraintes contractuelles …et aussi de la reprise des autres compétitions européennes. Si les clubs français ont repris la compétition mais que ce n’est pas le cas au niveau des autres nations, je ne vois pas comment l’équité sportive pourrait être respectée.

 

On mesure bien tous les problèmes, les difficultés et les incertitudes qui accompagnent cette fin de saison…
Exactement, nous devons être lucides et lever les hypothèses les unes après les autres en fonction de l’évolution de la situation qui semble actuellement bien compliquée. Pour tracer notre chemin, il est bien difficile de savoir, actuellement si nous partons au nord ou au sud… En attendant, nous n’avons pas d’autres solutions que d’attendre et de souhaiter beaucoup de courage à ceux qui vont prendre soin de nous durant cette période, le personnel médical qui sera sur le front, mais aussi à toute notre communauté de supporters, abonnés et partenaires ou prestataires que nous n’oublions pas et à qui nous recommandons de suivre les mesures sanitaires et de confinement afin de nous permettre de stopper, au plus vite,  cette épidémie et de retrouver chacun notre activité.