Droit dans ses crampons, le pilier clermontois, arrivé il y a maintenant deux saisons en Auvergne, a changé beaucoup de choses dans son jeu, ses postures et même son physique pour élever son niveau à celui auquel il évolue aujourd’hui. A l’image de la mêlée auvergnate, Rabah avance vers la finale sereinement.

 

Avant la demi-finale face aux Lyonnais, les articles le menaçant d’avoir « une épée de Damoclès au-dessus de la tête » (en raison de ses deux cartons jaunes) l’avaient fait sourire… pas trembler. « Mes deux cartons jaunes, je les ai eus en début de saison sur un plaquage haut et une double expulsion avec le pilier adverse sur des mêlées qui avaient du mal à trouver de la stabilité… » La réponse Rabah l’a donnée sur le terrain, en dominant de la tête et des épaules, l’édifice lyonnais (6 pénalités et 2 bras cassés récoltés par la mêlée clermontoise). Du grand art pour Rabah et sa bande qui portent la mêlée « jaune et bleu » tout en haut des statistiques du championnat (39 ballons gagnés sur introduction adverse loin devant les Rochelais seconds avec 27 ballons gagnés). Niveau discipline, plus rien au casier disciplinaire de l’ancien parisien : sa dernière pénalité en mêlée remonte à la réception de l’USAP, il y a 4 rencontres. Depuis Rabah a poussé tous ses adversaires à la faute sans en commettre une seule. « A un moment  Rabah avait été mal étiqueté », confie Didier Bès le maître ès « mêlée » de la maison « jaune et bleu » et avait trainé une réputation aussi difficile à faire disparaitre qu’un sparadrap collé sous la chaussure. « Nous avons du beaucoup travailler pour changer des petites choses, régler sa posture pour qu’il puisse donner une bonne « photo » de sa position en mêlée. » Thomas Domingo, lui aussi passé par ces périodes « d’incompréhension », analyse la situation. « A un moment, tu es obligé d’évoluer et de remettre en cause ta façon de faire en fonction des nouvelles règles ou consignes. Cela fait partie du rugby moderne et Rabah a parfaitement su le faire. » Le droitier des « jaune et bleu » a ainsi passé du temps avec Didier à examiner, sous toutes les coutures sa posture et ses attitudes, à travers de longues séances de vidéo ou lors d’exercices spécifiques en opposition ou au joug. Une étude de fond accompagnée d’un travail physique « qui a permis de rééquilibrer ses forces et de réaliser une transfert musculaire » selon le préparateur physique clermontois, Sébastien Bourdin qui a constaté une évolution significative de ses performances. « Cette remise en cause physique va avec le rugby que nous voulons développer », poursuit Didier Bès. « Il y a une vie après la mêlée et la conquête ! Avec le travail que Rabah a effectué, il a gagné en précision et en énergie ». Il peut désormais l’utiliser dans d’autres tâches. « C’est ce qu’on lui demande ! Cela fait partie de notre culture et cela correspond à son évolution. Nous lui demandons beaucoup plus en défense, en attaque… Rabah a accepté ce challenge, il connait les standards du niveau international » C’est avec ceux-ci qu’il évolue aujourd’hui à Clermont. 

 « C’est plus facile de dire que l’autre triche que d’admettre que tu subis ! »

Une présence de plus en plus importante dans le jeu de mouvement sans que cela ne vienne troubler son exercice de prédilection, bien au contraire… « Rabah est un client en mêlée » poursuit Thomas Domingo qui l’a côtoyé en équipe de France et l’a affronté avec Clermont et Pau. « Il fait partie de ces piliers difficiles à jouer avec un centre de gravité bas et beaucoup de technique. Il est propre dans tout ce qu’il fait et possède une énorme régularité. Dans une rencontre beaucoup de piliers peuvent connaitre un ou deux mêlées où ils passent à côté… pas lui. » « C’est le prototype du pilier droit difficile à manœuvrer », détaille Didier Bès. « Il est bas tout en étant doté d’une grosse force au niveau du dos, des reins et des cuisses. Il est épais. Pour un gaucher il n’y a pas beaucoup de points d’ancrage ». Thomas Domingo, qui prendra en charge le domaine de la mêlée fermée la saison prochain à la Section Paloise avoue que Rabah fait partie des piliers « qui l’ont mis dans le dur ! » Pas si fréquent de reconnaitre dans un exercice, qui a tout d’un bras de fer, la force de son adversaire. Et si la « mauvaise réputation » venait simplement de là… Comme le reconnait l’ancien clermontois « pour certains, c’est plus facile de dire que l’autre triche que d’admettre que tu es pris ou que tu subis ». Thomas qui n’était pas le dernier à mettre au supplice ses adversaires a connu cela. Peut-être faut-il passer par là ? Seuls les piliers savent vraiment ce qui se passe dans leurs confrontations… Ce que Thomas sait, en revanche, c’est que Rabah « fait partie de ces piliers qu’il vaut mieux avoir de ton côté qu’en face ». Samedi, c’est bien de son côté et de celui de son club formateur que « Doming » poussera pour faire avancer les Auvergnats sur la pelouse du stade de France.

 

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