S’il est un joueur pour qui le mot respect veut bien dire quelque chose, c’est bien le droitier clermontois, Davit Zirakashvili. Ce roc, « inusable » comme le qualifiait « L’Equipe » en début de semaine, tient la baraque depuis plus d’une décennie, toujours avec la même solidité, la même modestie et un profond respect pour son poste et les hommes de première ligne en général. Derrière sa barbe fournie et son regard sombre se cachent l’un de meilleurs joueurs du monde et l’un des personnages les plus attachants du championnat. Ce soir, face aux Anglais de Northampton, bousculés dans ce domaine lors du match aller, il sait que sa prestation aura probablement une grande incidence sur le gain de cette rencontre capitale. Portrait

La pigmentation « poivre et sel » de sa barbe est bien le seul signe du temps qui semble marquer l’épaisse carcasse de celui que tout le monde surnomme « Dato » dans les couloirs du club. A 35 ans, le droitier « jaune et bleu » reste et demeure cette garantie sans faille aussi bien à droite de la mêlée auvergnate que dans le vestiaire. Celui dont les mots, rares et profonds, claquent quand le moment est opportun pour mobiliser, rassurer ou encourager. Rien n’est dans le superflu pour ce pilier besogneux, plus affûté qu’une lame même après sa quinzième saison sous le maillot auvergnat, qui ne cherchera jamais à exister par une déclaration, une pitrerie face caméra, ou une envie de buzz. Ses prestations sur les terrains et son dos en acier forgé suffisent à une notoriété qui a traversé le monde de l’ovalie et en fait aujourd’hui l’un des piliers les plus respectés et redoutés du Nord de l’Irlande au pays du long nuage blanc. Et ne comptez pas sur lui pour s’exprimer sur sa longévité, ses performances ou ses adversaires, le géorgien laisse cela aux autres sans se soucier vraiment de ce qui se dit ou s’écrit sur lui. Pas qu’il s’en désintéresse mais plutôt qu’il s’en protège car « les flatteries peuvent te faire changer ta façon de penser, de voir les choses » dit-il. Et pas question de changer cette exigence que s’impose ce personnage immensément intelligent qui en dehors du terrain pourra entretenir avec vous des discussions riches et passionnantes sur des sujets aussi variés que l’Histoire, la géopolitique, l’Économie et bien d’autres choses. Après avoir vu Aurélien Rougerie raccrocher les crampons en fin de saison dernière, Dato est désormais le plus ancien joueur de l’effectif « jaune et bleu » qu’il a rejoint en 2004 en provenance d’Aubenas en tant que joker médical de Martin Scelzo, un autre monument de l’axe droit montferrandais avec qui il décrocha le premier titre de Champion de France de l’histoire de club en 2010.

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Après la blessure (lésion musculaire au mollet lors d’un entraînement) de Rabah Slimani auteur d’un excellent début de saison, Dato a repris le flambeau et élevé son niveau à celui qui est le sien en quelques titularisations, histoire de relancer la machine : le Top niveau. Bien trop humble pour le reconnaitre (et trop respectueux de ses adversaires pour le laisser paraître), il laisse naturellement transpirer un « bonheur » simple d’être sur le terrain, une notion que n’a certainement pas partagé son adversaire direct, le jeune international Dany Priso, plié, bloqué, blackboulé tout au long d’un après-midi auvergnat qui a dû lui sembler bien long. Dato n’en rajoutera pas, ne chambrera pas, ne mettra pas une petite tape sur le sommet de crâne de son adversaire pour lui signifier sa supériorité ce jour-là car il sait mieux que personne que la mêlée est un art noble où tout le monde tôt ou tard peut connaitre un jour ou une mêlée sans. Comme tous (mais probablement bien moins souvent que les autres) cela lui est arrivé. C’est aussi cela le respect.

Dans un monde où tout s’achète, le respect fait encore exception : il se mérite ou se doit, mais dans tous les cas, il se gagne. Celui Davit Zirakashvili est immense pour ceux qui ont la chance de le côtoyer.

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